Christophe Decultot, directeur de la Business Unit Fiat VP a accordé à Autosital.com un long entretien. Troisième et dernière partie consacrée aux produits actuels du constructeur, mais aussi à l’avenir de la gamme et du marché français.
Depuis son lancement, la Fiat Stilo n’a jamais trouvé son public malgré de nombreuses opérations séduction. Le problème a-t-il été identifié sur ce modèle ?
La Stilo va continuer jusqu’à début 2007, date à laquelle un tout nouveau modèle lui succèdera. Le problème, oui, il a été identifié. Je pense qu’il date de la période de lancement, où les positionnements produits/gamme et publicitaires n’étaient pas les plus judicieux. La voiture, et je pense particulièrement aux 5 portes et Multiwagon, n’a jamais trouvé sa place et n’a jamais su avoir l’image suffisante pour soutenir des volumes conséquents. Aujourd’hui nous concentrons plutôt nos efforts sur la 3 portes, qui garde un rythme de vente honorable grâce à une vraie valeur ajoutée, notamment au niveau du design.
Ce que je peux vous dire aussi c’est que les ventes de Stilo à particuliers via le réseau de concessionnaires se sont stabilisées, mais nous avons sur Stilo arrêtés les ventes à loueurs et arrêtés les 0 kilomètre dont ce modèle faisait fortement l’objet il y a encore deux ans. Donc c’est vrai que vu de l’extérieur, quand on regarde les immatriculations, il y a une forte baisse, mais finalement la voiture est relativement stable, à un niveau modeste. C’est important pour maintenir un petit peu la valeur du produit sur le marché.
La Panda est quant à elle beaucoup plus convaincante.
Aujourd’hui un des piliers importants du volume de la marque, c’est effectivement Panda et Panda 4×4. Panda est sur le segment A le premier modèle étranger vendu avec 12 400 unités cette année. La version 4×4 fonctionne très bien aussi. Nous serons, avec l’arrivée des motorisations diesel le mois dernier, premier petit 4×4 sur le marché français à la fin de l’année. Nous aurons une version Panda SUV au début de l’année prochaine. C’est une version traitée de manière plus ludique en termes de présentation et de carrosserie.
Panda est donc un pilier important. Grande Punto va le devenir aussi. Nous allons maintenir en production l’ancienne Punto jusqu’à fin 2006 pour vraiment bien couvrir, avec une gamme simplifiée, l’ensemble du segment des petites voitures.
Maintenant l’avenir, construire une vraie présence Fiat sur les segments au-dessus, parce que c’est important à moyen terme pour la marque, ça va passer par un nouveau SUV compact qui va être lancé au mois d’avril, le Sedici. Il va s’inscrire sur le segment des Toyota Rav 4. C’est un engin important. Ensuite bien sûr ça passera par le successeur de la Stilo, sur le segment C, début 2007.
Avec Panda 4×4 et SUV, le Sedici va être le troisième modèle 4×4 de Fiat. Ce n’est pas un peu beaucoup d’un coup ?
Non, ce n’est pas trop parce que le marché des 4×4 en France c’est aujourd’hui près de 100 000 voitures. Ca devient un segment très important en volume. Donc ce n’est plus un segment de niche, c’est un vrai segment à part entière, c’est très important d’y être présent.
– Ces modèles sont pourtant de plus en plus décriés. Il y a un réel avenir ?
Il y a un débat effectivement sur l’utilité d’un 4×4, notamment des gros 4×4 qui sont perçus comme des engins qui consomment plus donc qui polluent… La vocation de Fiat est de rester sur le segment des tous petits 4×4, avec Panda. Là, en termes de respect de l’environnement et des consommations, avec le Multijet, on est sur des émissions extrêmement basses. Et avec le Sedici, nous sommes sur le segment des 4×4 compacts, qui, s’ils sont bien conçus, en terme de consommation et d’émission sont au même niveau qu’une berline équivalente. En tous cas c’est l’objectif avec le Sedici.
Ce véhicule aura de vraies capacités tout terrain pour les clients qui le voudront. Ils ne seront pas majoritaires, c’est vrai. Mais il y a une vraie tendance de fond qui est la recherche d’une alternative à la berline et au monospace compact. Le monospace compact est très teinté famille. Il y a la recherche d’un produit confortable, d’un produit où l’on a une position de conduite assez haute, un produit un petit peu mode aussi. Il y a un public qui trouve vraiment son bonheur dans les 4×4 compacts. Il faut être présent et c’est un marché qui va continuer à se développer. Par contre les très gros 4×4, parce qu’ils sont lourds, parce qu’ils sont chers aussi, vont commencer un peu à passer de mode. On commence à le voir aux Etats-Unis d’ailleurs.
Mais en ce qui concerne Fiat, nous n’avons ni la volonté ni le souhait d’aller sur des plus gros 4×4.
Le face-lift du Multipla en septembre 2004 a-t-il porté ses fruits ?
Oui ça a fait évoluer les ventes. A fin septembre, donc sur les neufs premiers mois, nous avons doublés les ventes par rapport à l’année dernière. On est à +92%, avec 2 000 immatriculations. On va donc approcher les 3 000 unités cette année. Le face-lift lancé il y a un an a vraiment dopé les ventes, donc c’est positif. Le produit est sur ses objectifs. Maintenant soyons clairs, 3 000 véhicules sur un segment monospace compact qui aujourd’hui est assez important, en terme de pénétration sur le segment c’est encore relativement bas. Mais en tous cas ça a vraiment permis de relancer.
Dans la gamme Fiat, il y a des véhicules dont l’utilité ne parait pas immédiate. Je pense à la Stilo Uproad, vrai faux 4×4, à la Panda Alessi, ou à la 600 50th Anniversary. Qu’en est-il ?
Les trois exemples ont des objectifs et des avenirs d’un point de vue commercial assez différents. En ce qui concerne Panda Alessi, le but est de faire une petite série qui renforce l’italienneté de la marque. C’est un partenariat avec la marque Alessi qui est reconnue dans le domaine des accessoires de cuisine, avec un design très italien. C’est un produit qui est plutôt un clin d’œil, qui est assez radical dans le traitement des couleurs, qui peut être un petit produit « mode » mais extrêmement ciblé. Panda Alessi n’a pas de vocation ni d’ambition commerciale au-delà de 100-150 unités. Je pense que ça nourrie positivement l’image et ça donne aussi l’occasion d’exposer des choses un petit peu différentes et décalées dans le sens positif sur les salons.
Fiat 600, c’est différent. Elle vient d’être reliftée. On a développé une série 50th Anniversary. Il y en a dans les showrooms de nos concessionnaires, et en fait aujourd’hui ça se vend très bien. La Seicento représentait une quarantaine de ventes par mois, aujourd’hui le face-lift et la série 50th Anniversary son très bien perçues et ce mois-ci on va faire 150 commandes. Il y a une très bonne réceptivité. En fait les gens à la recherche d’un petit produit urbain se réintéressent à la 600, qui est la moins chère du marché. Son nouveau look plait bien.
Pour l’avenir, quelles vont être les évolutions ? Les nouveaux modèles ?
En 2007, c’est le lancement de la nouvelle Fiat 500, la Trepiunio, qui va rester en ligne avec le concept. En intégrant toutes les contraintes de production, d’industrialisation, mais on va être dans l’esprit du prototype qui a été montré à Genève il y a maintenant un an et demi.
Concernant la Stilo en 2007, ce que je peux dire, c’est que vous voyez avec Grande Punto un retour au design très italien. La future Stilo ne va pas déroger à cette nouvelle règle, bien au contraire. C’est un produit sublime, aux lignes très italiennes.
Enfin, l’avenir, avec les hausses successives des prix des carburants, c’est le développement des énergies alternatives. Quelle est l’orientation de Fiat dans ce sens ?
Notre alternative aujourd’hui c’est le gaz naturel, à travers notre gamme Natural Power. C’est très pertinent car c’est du gaz de ville, à ne pas confondre avec le GPL. C’est une offre usine, donc nos voitures sont équipées sur nos chaînes. Sur le marché italien nous avons déjà 400 000 véhicules en circulation, on a par conséquent un vrai savoir faire.
Nous avons en France une gamme assez large sur ce marché qui est en train de naître. On a l’ancienne Punto, qui reste en production, le Multipla, le Doblo en véhicule particulier ou véhicule utilitaire, et le Ducato en fourgon, soit cinq modèles.
Cette énergie au gaz naturel offre beaucoup d’avantages. Déjà c’est une bicarburation, donc il y a aussi un réservoir d’essence. On passe assez facilement du gaz à l’essence. En termes d’émission polluante, c’est exceptionnel. Il y a aussi des avantages fiscaux qui sont fait à l’achat d’un véhicule de ce type. Il y a une remise sur impôt d’environ 1 500 euros. Ca procure ainsi beaucoup d’avantages.
Aujourd’hui c’est un marché qui se limite aux professionnels, aux entreprises, et surtout aux collectivités locales. Fiat est le premier fournisseur de GDF. C’est un marché qui est en train de se développer. On le voit dans beaucoup d’appels d’offres d’un certain nombre de villes qui souhaitent, pour montrer l’exemple en quelque sorte, renouveler leur parc avec cette énergie. Maintenant, sur le marché des particuliers, aujourd’hui se pose encore clairement le problème des ravitaillements. Il y a deux pistes, et nous travaillons avec GDF là-dessus. Il y a une piste que GDF développe avec un système de compresseur, qui serait proposé aux particuliers qui ont un garage et le gaz de ville. C’est une solution intéressante qui peut permettre d’ouvrir le marché des particuliers. En parallèle il y a aussi des discussions entre GDF et des pétroliers pour avoir rapidement un certain nombre de stations services équipées de pompes au gaz naturel. Je pense que c’est une bonne solution d’avenir dans les dix prochaines années.